Edison à l’école
«THOMAS, fit durement le maître d’école, vous ne serez jamais qu’un sot!» Sous le poids de cette sombre prophétie, l’élève courba le front et pleura. Puis comme, au retour de la classe, ses larmes coulaient encore —grosses larmes intarissables d’un bambin de huit ans— sa mère l’interrogea. Au récit de l’enfant, blessée dans sa fierté maternelle, elle bondit jusque chez le maître d’école et lui cria : «Monsieur, mon fils est moins sot que vous ! Désormais, instruit par mes soins, il se passera de vos leçons.»
Cette scène avait lieu vers 1855, dans le petit bourg de Port-Huron (Etat de Michigan), où Thomas Alva Edison —né le 11 février 1847 à Milan, village de l’Ohio— venait d’arriver avec les siens. A Port-Huron, les vieilles se souviennent encore aujourd’hui de cette famille Edison: le père, assez peu entendu en affaires, mais réputé pour son «humour»; la mère, originaire comme son mari du Canada, où elle avait été institutrice; enfin Thomas, gamin bizarre, renfermé et étourdi, dont sa mère vantait l’intelligence docile, ouverte surtout aux choses scientifiques, mais que tout le village appelait un «bêta».
Ne le voyait-on pas sans cesse rôder parmi les chantiers et les quais et poser aux ouvriers mille questions oiseuses sur leur travail ou leurs outils ? «A quoi sert ceci ? Comment démonte-t-on cela?»
«C’est un niais, un cancre» répétait-on après le maître d’école, sans comprendre combien cette curiosité enfantine et naïve cachait déjà d’esprit d’analyse et d’observation.
Edison vendeur dans les trains
De très bonne heure (car nous sommes en Amérique), le petit Thomas veut gagner de l’argent: Et le voici, à onze ans et demi, marchand de journaux et de cigares dans les trains qui font le service entre Détroit et Port-Huron. La guerre de 1860 augmente la soif de nouvelles et la vente des gazettes : si bien que, au bout d’un an, notre vendeur —qui a dû s’adjoindre quatre auxiliaires— peut porter à ses chers parents une somme de 2000 dollars! «Ce fut, raconte-t-il, le premier grand bonheur de ma vie.»
Ce précoce sens des affaires va bientôt s’accuser encore. Sur le train même où circule le jeune marchand, dans un coin étroit du wagon de marchandises, il a installé une petite presse à bras et là, il rédige, compose et tire à 500 exemplaires un journal grand comme un mouchoir de poche, le Weekly Herald qui, pour trois sous, donne aux voyageurs voyageurs toutes les nouvelles recueillies aux stations : naissances, mariages, décès, faits divers… sans compter les fautes d’orthographe. Un seul numéro en subsiste, daté du 3 février 1862, que Mme Edison conserve précieusement. (ndlr: Texte original écrit en 1905)
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