Appuyez sur “Entrée” pour passer au contenu

L’organisation du service de l’heure (3)

Il nous faut dans le fractionnement du temps aller jusqu’à l’infiniment petit : hier la seconde, aujourd’hui le dixième et même le centième. Tel est, en effet, l’un des desiderata exprimés par la Conférence internationale de l’heure qui s’est réunie à l’Observatoire de Paris au mois d’octobre 1912. Je ne vous rappellerai pas les décisions prises par la Conférence, ce serait vous faire injure en laissant croire que des membres de la Société Astronomique de France ne suivent pas avec la plus grande attention tout ce qui est relatif au progrès de l’astronomie. A ceux d’entre vous cependant qui (voudraient se remémorer les travaux de ce concile scientifique (et œcuménique), je conseille de lire l’article si savamment résumé que notre sympathique secrétaire adjoint, M. Touchet, a publié dans La Nature. Le sujet que je dois traiter m’amènera d’ailleurs forcément à vous rappeler certaines décisions de ce Congrès.

Je vais, en effet, examiner rapidement ce que l’Observatoire a fait et ce qu’il se propose de faire pour la réalisation des projets étudiés et votés par la savante réunion. Le premier problème à résoudre est celui de la détermination de l’heure, et cela au centième de seconde, si possible. Une lunette méridienne et une pendule sidérale donnent la solution de cette question, ou plutôt la donneraient si l’observateur et les instruments étaient parfaits, mais la perfection n’est pas de ce monde ! Un astronome exercé, avec de bons outils, observant dans des conditions atmosphériques favorables et tenant compte de toutes les causes perturbatrices connues (il y en a certainement et malheureusement d’inconnues) peut espérer déterminer la correction de sa pendule à quelques centièmes de seconde près, mettons, si vous le voulez, à trois ou quatre centièmes. C’est déjà coquet ! Imaginons que deux, trois, …, dix observateurs fassent la même détermination avec des instruments différents, il est de toute évidence que la moyenne des corrections de pendule présentera une précision plus grande, une partie des erreurs accidentelles s’éliminant forcément. On peut aussi, par la multiplicité des mesures effectuées simultanément, faire disparaître certaines erreurs systématiques inhérentes à chacun des instruments employés, mais variables d’un instrument à l’autre et devenant de ce fait de véritables erreurs accidentelles. La plus ou moins grande exactitude des ascensions droites calculées des étoiles fondamentales et notamment des circompolaires a aussi une influence très sensible sur la détermination de l’heure. La précision toujours croissante des catalogues stellaires permettra probablement d’avoir, à bref délai, toute l’exactitude voulue relativement aux coordonnées des, étoiles fondamentales.

Comment réaliser ce plan de travail d’ensemble. L’Observatoire de Paris pourrait à la rigueur affecter trois lunettes de passage à la détermination astronomique de l’heure. Ce serait peu. Mais il y a heureusement d’autres observatoires que le nôtre, et il est certain que la collaboration d’un grand nombre de centres astronomiques permettra d’assurer au mieux la connaissance de l’heure. On peut, sans exagération, admettre qu’à un moment donné, soit par nos propres observations, soit par celles dei zélés collaborateurs, nous aurons l’heure à moins de deux centièmes de seconde. Je n’ose pas encore écrire à moins de un centième. Ce serait du bluff. Nous verrons plus loin comment est organisé ce travail en commun, grâce à la télégraphie sans fil et avec fil.

Mais cette heure il nous faut la conserver pour que les appareils émetteurs de signaux puissent être réglés au moment opportun. Il nous faut même la conserver longuement pour les jours, et ils sont nombreux, où l’observation du ciel est impossible. La malchance, avec laquelle il faut toujours tabler, peut faire que la collaboration sur laquelle nous comptons fasse défaut, soit qu’il y ait partout inclémence du ciel, soit que l’on ne puisse transmettre les signaux horaires de comparaison. Ce dernier fait s’est produit lors de l’inondation de fin janvier 1910. Les dispositions prises au poste de radiotélégraphie militaire du Champ-de-Mars le mettent heureusement à l’abri de tout danger d’immersion, sauf en cas de déluge ! Je sais aussi que depuis ce cataclysme on a, en paroles surtout, pris de nombreuses précautions et que la Seine serait mal reçue à sortir de son lit, mais le fait de l’interruption des communications télégraphiques peut se renouveler sous une autre forme. Et puis, comme l’a dit La Fontaine : Ne t’attends qu’à toi seul : c’est un commun proverbe.

Examinons donc ce que l’on a fait à l’Observatoire pour assurer à nos pendules la meilleure marche. Laissez-moi vous dire tout d’abord, dussé-je mettre contre moi tous les horlogers du monde, qu’il n’existe pas de bonnes pendules, au point de vue astronomique s’entend. La seule qui soit rigoureusement précise, c’est l’horloge céleste. Malheureusement, je le répète, car je ne veux pas être plus tendre pour les astronomes que pour les horlogers, les instruments (méridiens ou autres) qui nous servent à lire l’heure sur le magnifique cadran qu’est le ciel ne sont pas plus parfaits que nos horloges terrestres.

Suite de l’article

Soyez le premier a laisser un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

19 − 5 =

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Ce site est protégé par reCAPTCHA et Google Privacy Policy et Terms of Service apply.