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L’organisation du service de l’heure (5)

Voici donc une pièce d’horlogerie très soignée, un pendule oscillant dans un milieu à l’abri de tout mouvement extérieur de l’air, à température, à pression, à état hygrométrique constants, un rouage préservé de toute poussière, un système de remontage électrique agissant régulièrement toutes les 34 secondes, en un mot un régime normal bien établi. Cette pendule nous ne la troublons dans l’accomplissement de sa haute fonction que de loin en loin, le plus rarement possible, car ce n’est pas un plaisir de descendre à 28 mètres sous terre, et il est encore moins agréable de remonter les 171 marches d’un escalier en limaçon. Et puis on ne se sent pas à l’aise dans ces galeries souterraines, les astronomes ne sont pas entrainés au métier de mineur. Les lectures du baromètre, du thermomètre, de l’hygromètre, les mesures de l’amplitude du balancier et de la durée du remontage électrique ne demandent que quelques minutes, après lesquelles on referme hermétiquement le cachot où la prisonnière nous mesure le temps sans jamais se plaindre, n’ayant pour distraction que son tic-tac monotone ou le bruit de la goutte d’eau qui tombe de la voûte de sa prison.

Eh bien ! Croyez-vous qu’avec une telle horloge nous avons un instrument capable de garder l’heure pendant plusieurs jours d’une façon absolue et certaine ? Ma réponse est franchement négative. Certes, si nous voulions nous contenter de la précision exigée pour les usages courants de notre existence, nous pourrions ne contrôler la pendule que rarement. Mais quand il s’agit du centième de seconde, c’est autre chose, il faut le contrôle quotidien fourni par l’observation du ciel. En dehors de ce contrôle, pas de certitude. La marche diurne qui est aujourd’hui de + 0,02 sec., sera peut-être demain de -0,02 sec. !

Nous avons souvent enregistré des variations de cet ordre, quelquefois même de plus fortes. Mais s’il faut être difficile, il ne faut pas l’être à l’excès. Et quand on compare ce que nous donne cette nouvelle pendule avec ce que nous donnaient autrefois nos pendules fondamentales, il faut reconnaître qu’un progrès immense a été réalisé, « colossal » diraient les Allemands.

Nous voici donc en possession d’une pendule nous donnant le temps sidéral d’une façon très satisfaisante, il faut d’ailleurs se contenter de la précision obtenue, jusqu’à ce qu’on ait fait mieux. Ce n’est pas tout. Cette pendule directrice (Riefler D) synchronise une seconde pendule (Riefler A2) qui, à son tour, actionne un relais distributeur de l’heure sidérale aux pendules placées près de nos instruments. De ce côté nous voilà pourvus. Mais il nous faut avoir l’heure de temps moyen, heure assurée par de bonnes pendules installées dans de bonnes conditions. Or, je viens de le dire, il n’est guère pratique de placer toutes les pendules dans les Catacombes ; c’est d’autant moins réalisable que, vu l’humidité des galeries, il faudrait que ces horloges fussent hermétiquement closes. La réalisation d’un tel projet grèverait peut-être un peu trop le budget de l’Observatoire et puis, y a-t-il urgence à procéder ainsi? Je ne le crois pas, du moment que nous avons une pendule principale à laquelle nous pouvons comparer les autres. Toutes nos pendules sont situées dans une salle semi-souterraine, au rez-de-chaussée (côté cour) de la Tour de l’Est. Dans une première vitrine, les trois pendules chargées de synchroniser un certain nombre de centres horaires de la ville, dans une seconde, trois pendules sidérales (fig. 105), à gauche, la pendule Riefler A2, au milieu, la célèbre pendule Winnerl qui, pendant plus d’un demi-siècle, a donné l’heure sidérale à l’Observatoire et qui la donnerait encore tant bien que mal si la précédente venait à nous manquer, ce qui arrivera fatalement, enfin, à droite, une excellente pendule signée Fénon. La pendule Winnerl a beaucoup souffert d’un séjour prolongé dans les Catacombes, le coffre qui la recouvrait n’était pas fermé assez hermétiquement, il a fallu les soins éclairés de notre savant horloger M. L. Leroy pour lui permettre de reprendre au besoin son rôle de pendule fondamentale.

La troisième vitrine renferme les deux pendules Leroy chargées actuellement de l’envoi des signaux horaires et une pendule Fénon de temps moyen; il reste une place pour une quatrième pendule, on y installe actuellement une pendule à pression constante de M. L. Leroy. Vous voyez (fig. 107) l’intérieur de cette cabine. Je n’insiste pas sur le détail des accessoires contenus dans cette vitrine, ils sont relatifs à l’envoi de l’heure, mais comme tout le système d’envoi sera modifié le 1er juillet 1913 (décision du Congrès de l’heure), leur description ne présentera bientôt plus qu’un intérêt rétrospectif. La planche hors texte vous donne un ensemble de la salle et des trois vitrines. Ne vous semble-t-il pas être dans la demeure de l’Amateur d’horloges, ami de Boileau?

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